#AG2023 / Genre et formation-insertion
Les rencontres du Réseau FAR, qui se sont tenues du 5 au 8 juin 2023 à Kribi, au Cameroun, ont réuni une trentaine de représentants de 13 pays. Placées sous le signe de l’égalité homme-femme, ces journées ont été l’occasion de poursuivre le processus initié pour construire la stratégie genre du Réseau FAR et offrir aux membres de la gouvernance un éclairage sur le dispositif de formation-insertion camerounais AFOP. Des temps d’échanges essentiels pour ce réseau international qui se structure. Retours sur l’événement.
Jour 1&2 : stratégie genre
Pierre Blaise Ango, Président du Réseau International de Formation Agricole et Rurale, a ouvert les travaux de l’atelier, en soulignant l’importance d’inclure le genre dans le programme de travail, compte tenu des droits des groupes sociaux vulnérables, y compris les femmes rurales, à contribuer au développement de la société.
Le Réseau FAR s’est appuyé sur l’équipe d’experts (TERO) pour animer ces deux journées consacrées au genre. Thaddee Yossa, facilitateur et expert genre, a mis l’accent sur l’importance de l’équité entre les groupes de la société afin de combattre l’injustice et les différences et d’atteindre l’objectif ultime de l’égalité. Il a expliqué divers concepts et termes liés au genre. Puis il a abordé le diagnostic du genre selon un accompagnement en quatre étapes : cadre conceptuel, diagnostic de la situation de genre, définition de la stratégie du genre, et plan d’action pour l’intégration du genre dans le système de formation professionnelle agricole et rurale. Il a souligné que la méthodologie envisagée était basée sur une approche participative à travers l’échange de points de vue entre les représentants des membres pays du réseau, avec l’organisation en amont de trois séminaires à distance.
Les participants ont échangé sur les obstacles et les difficultés qui limitent l’intégration des jeunes filles et des femmes sur le marché du travail. L’expert a exhorté l’assistance à ancrer la notion de genre dans le système de formation professionnelle agricole et rurale en relançant certains événements internationaux tels que la journée internationale de la femme, la campagne internationale de lutte contre les violences faites aux femmes qui s’étend sur 16 jours, etc. Et en tenant compte des spécificités des femmes dans les espaces de formation et d’hébergement.
Visites de centres de formation
Des visites de terrain en groupe ont permis de découvrir deux centres de formation sous l’angle genre, en se concentrant sur des éléments de base liés au genre (recrutement de stagiaires, animation et formation, insertion professionnelle, organisation de la formation, évaluation de la formation) :
- un centre de formation professionnelle dans le domaine agropastorale (Centre d’Appui aux Initiatives Locales CAIL de Kribi)
- un centre de formation professionnelle dans le domaine de la pêche maritime traditionnelle (CFP de Londji)
Ces deux centres visités sont privés, les participants payant 25 000 FCFA euros par an. Ces frais ne couvrent donc pas les frais de formation, d’autant plus que le nombre de stagiaires ne dépasse pas 40 apprenants. La formation dure deux ans et s’organise par circulation entre le centre de formation (10 jours), la famille (10 jours), et l’exploitation (10 jours). Chaque centre dispose d’un comité de gestion présidé par le maire de la localité. L’affectation des stagiaires aux centres se fait par le biais d’un concours (oral et écrit) organisé par le Ministère de l’Emploi et de la Formation Professionnelle. Ce qui est remarquable, c’est que les moniteurs (= formateurs) forment et suivent les formés pendant qu’ils sont dans les structures familiales ou privées (via notamment des visites terrain), aident les diplômés à s’insérer professionnellement (en aidant garant de l’accès à la subvention, en les orientant dans la recherche de foncier, etc.), les suivent à vie et s’occupent des enfants des apprenants qui sont souvent présents dans les centres, y compris les nourrissons.
Afin d’en savoir plus sur la vie des centres, chaque groupe a été divisé en petits groupes afin d’échanger sur le cadre pédagogique et discuter avec les apprenants garçons et filles séparément.
Il est à noter que ces centres souffrent d’un manque d’équipements pédagogiques et d’espaces pratiques, en plus de l’usure des infrastructures.
Un processus multi-pays pour co-construire une stratégie genre au sein du Réseau FAR
Le deuxième jour a été consacré à la poursuite de l’atelier sur le genre. Une discussion riche et animée a eu lieu parmi les membres de la gouvernance sur le rôle que les centres devraient jouer dans le domaine du genre, à savoir :
- un moindre rôle limité à la prise en compte du genre social, notamment des femmes, dans la formation ?
- un rôle de médiateur représenté pour aider les centres à surmonter certaines difficultés ?
- ou un rôle avancé représenté dans l’effort du centre pour changer les valeurs sociétales au profit du genre ?
Ces débats riches ont permis de mettre en exergue les visions des participants sur la nature du genre, sur le rôle du réseau dans l’accompagnement du genre dans le domaine de la formation dans les années à venir, sur la fonction principale de la stratégie du réseau, ou encore sur l’articulation de la stratégie du réseau dans le domaine du genre avec les stratégies nationales et avec la vision des centres de formation.
Ressources :
Genre : concept de base et FAR
Diagnostic genre Réseau FAR : résultats préliminaires
Jour 3 : Assemblée générale du Réseau FAR
La gouvernance du Réseau FAR a été renouvelée, avec un nouveau bureau élargi et conseil consultatif.
Découvrez la nouvelle composition de la gouvernance
Jour 4 : insertion
Pierre Blaise Ango et Franck-Martial Takamgang ont présenté le dispositif d’insertion professionnelle du programme AFOP au Cameroun. Ce programme vise à établir une agriculture de deuxième génération basée sur l’innovation, prenant en compte la productivité et la durabilité. Il comprend 122 établissements de formation répartis comme suit : 26 écoles de formation (niveau technicien de l’enseignement supérieur) et 96 centres de formation aux niveaux inférieurs. Les établissements de formation professionnelle jouent un rôle important dans l’intégration de leurs diplômés sur le marché du travail et s’attache à développer l’esprit d’entreprise pour créer des projets générateurs de revenus. Le programme AFOP apporte un soutien aux écoles et centres de formation, représentés à travers : l’élaboration d’un nouveau cadre législatif, la formation des acteurs dans le domaine de la formation, l’amélioration de la gouvernance, l’acquisition de fournitures et d’équipements, l’élaboration de nouveaux contenus de formation après définition des métiers, la construction et l’aménagement des espaces, le renouveau pédagogique, l’accompagnement à l’insertion professionnelle.
Ressources :
Support de présentation du dispositif national rénové de formation agropastorale et halieutique (AFOP)
Investir dans la formation professionnelle des jeunes: Programme de formation professionnelle des secteurs agropastoral et halieutique du Cameroun, FAO, 2022
Des expériences de plusieurs pays africains dans le domaine de la formation professionnelle agricole et de l’insertion professionnelle ont été partagées : le Programme National de Formation aux Métiers Ruraux (PNMR) en Côte d’Ivoire, le projet Structuration, Amélioration de la Formation Agricole et Insertion (SAFARI) au Togo, l’approche intégrée de la création d’emplois ruraux au Burkina Faso, la création récente de la Confédération des organisations africaines pour le développement de l’aviculture au Maroc et les initiatives menées en Tunisie.
En ce qui concerne l’expérience tunisienne, les point suivants ont été soulevés :
- un observatoire national de l’emploi et des compétences est mis en place au Ministère de l’Emploi et de la Formation Professionnelle ;
- l’Agence Nationale pour l’Emploi et le Travail Indépendant a été créée avec une extension régionale à travers des bureaux dans toutes les wilayas ;
- les diplômés des centres de formation professionnelle ne s’inscrivent pas dans les offices régionaux de l’emploi bien qu’ils y soient incités, ce qui rend difficile la poursuite de leur insertion sur le marché du travail. Les centres de formation professionnelle agricole se sont trouvés contraints d’accorder une grande importance à l’insertion des diplômés ;
- une importance particulière est accordée aux hommes et aux femmes analphabètes pour leur permettre de se former entre l’alphabet et le domaine technique (production, transformation et commercialisation) pour assurer l’indépendance de ces segments sociaux et améliorer leurs revenus grâce à la méthodologie champ école.
Découvrez les photos de l’AG
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Article réalisé par les représentants pays tunisiens (Khemaies ZAYANI, Sondos DERBEL) et l’équipe du Réseau FAR (Marie Picard).