Formation des paraprofessionnels vétérinaires : un gage d’efficacité d’un réseau de professionnels de santé animale
Améliorer la qualité des services vétérinaires en renforçant les compétences des paraprofessionnels vétérinaires est au cœur du Projet P3V de l’organisation mondiale de la santé animale (OIE), auquel le réseau FAR est partenaire. Échanges avec le coordinateur régional du projet, Dr Bachir Souley Kouato, qui revient sur l’importance d’améliorer la formation paraprofessionnelle.
Comment définit-on un paraprofessionnel vétérinaire ?
Un paraprofessionnel vétérinaire (PPV) se définit comme une personne ayant suivi une formation officielle menant à l’obtention d’un certificat, d’un diplôme ou d’un grade, dispensée par des institutions de formation accréditées par l’agence gouvernementale appropriée ou par l’organisme statutaire vétérinaire (OSV) et que les activités qu’elle sera autorisée à mener reflèteront son niveau de formation officiel. Une définition plus détaillée est donnée dans le glossaire du Code terrestre de l’OIE. Cependant, la définition de PPV varie d’un pays à un autre et les tâches qui lui sont confiées dépendent non seulement de la formation du PPV, mais aussi des besoins spécifiques à chaque contexte.
Quels rôles peuvent jouer les PPV dans le système de santé animale ?
En général, les systèmes de santé animale comprennent des docteurs vétérinaires (publics et/ou privés), des PPV, et des agents communautaires de santé animale (ACSA). La dénomination de ces derniers varie également d’un pays à un autre. Par exemple, les ACSA sont désignés au Togo par le terme AVE (Auxiliaire Villageois d’Elevage) tandis qu’au Sénégal, ils sont appelés AE (Auxiliaire d’Elevage). Il est utile de préciser que les ACSA sont différents des PPV car ne répondant pas de fait aux critères de définition de cette catégorie et ne possédant pas généralement de diplôme ou d’un certificat délivré par un établissement de formation agréé par le gouvernement ou l’OSV.
L’OIE reconnaît l’importance du rôle que peuvent jouer les PPV pour soutenir les Services vétérinaires nationaux, notamment dans la mise en œuvre des stratégies de contrôle des maladies animales. Ils sont d’autant plus importants dans les pays africains au Sud du Sahara où l’insuffisance des vétérinaires a été notée lors de l’évaluation des Performances des Services Vétérinaires (PVS) de la plupart des Etats. Ainsi, les PPV peuvent être amenés à assumer diverses fonctions liées à la santé et production animale.
A titre d’exemples, les PPV peuvent être autorisés à participer :
- aux activités de contrôle et prévention des maladies animales comme le traitement des animaux, gestion des stocks de médicaments vétérinaires, l’organisation et la mise en œuvre des campagnes de vaccination et de déparasitage, etc. ;
- aux activités de santé publique vétérinaire telles que le contrôle de la rage ou d’autres zoonoses ou encore la sécurité sanitaire des aliments d’origine animale ;
- aux activités de surveillance épidémiologique, y compris le travail dans des laboratoires vétérinaires, tel que la réalisation de tests de diagnostic. Des informations complémentaires sont fournies dans l’article suivant : Le rôle des para-professionnels vétérinaires (PPV) dans la provision de services vétérinaires en Afrique – OIE – Afrique
Quelles sont les compétences requises pour être un PPV ?
Il faut d’abord noter que la formation des PPV souffre d’une absence notoire de référentiel commun de formation, autrement dit il n’existe pas de formation standardisée en termes de contenu pédagogique, des compétences requises, de durée de la formation, très souvent de personnes qualifiées pour la formation et l’évaluation des PPV, etc. Par conséquent, on note une diversité de compétences ou de capacités des PPV entre les pays ou même au sein d’un pays.
Afin de soutenir ses Pays Membres, notamment les autorités vétérinaires et les organismes statutaires vétérinaires, à rédiger les descriptifs de poste standardisés pour les PPV basés sur les compétences, l’OIE a développé deux documents stratégiques à savoir :
- Recommandations de l’OIE sur les compétences des paraprofessionnels vétérinaires. Ce document identifie un certain nombre de domaines d’activités clés dans lesquels les PPV peuvent être impliqués. Ces domaines d’activités relèvent de trois filières à savoir la santé animale, la santé publique vétérinaire et le diagnostic en laboratoire. Pour chaque domaine d’activité, deux à quatre compétences pertinentes attendues des PPV sont identifiées. A titre d’exemple, dans le domaine de “Science animale et vétérinaire”, une des compétences requises est la connaissance des fondements de la science animale y compris les soins, la nutrition et la reproduction des espèces animales importantes pour le pays et la région.
- Lignes directrices de l’OIE pour le cursus de formation des paraprofessionnels vétérinaires. Dans ce document, l’OIE a développé des modèles de programmes d’enseignement conçus pour apporter des compétences à chacune de ces trois filières. Ces recommandations et lignes directrices peuvent servir pour évaluer ou mettre à jour les cursus des établissements de formation. Ils peuvent aussi être utilisés par les employeurs (dont les services publics) ou par les PPV eux-mêmes pour évaluer leurs compétences et pour identifier leurs besoins en formation continue.
Quelle est l’approche d’intervention du projet P3V pour renforcer les compétences des PPV ?
Il faut au préalable rappeler que dans la plupart des pays africains, notamment ceux au sud du Sahara, le nombre de vétérinaires reste insuffisant pour couvrir l’ensemble du territoire en services de santé animale appropriés. Le manque de personnel vétérinaire en général est plus ressenti dans les zones rurales, loin des centres urbains, menaçant ainsi la vie des éleveurs et de leurs animaux. Pour pallier cette déficience en personnel vétérinaire, l’OIE recommande fortement à ses pays membres de faire une analyse du réseau de professionnels de santé animale pour identifier les besoins en termes de compétences et de maillage sur le territoire. Le recours à des PPV adéquatement formés pour faire face aux réalités du terrain, tout en tenant compte des nécessités de contrôle et de supervision par un vétérinaire, peut être une solution durable. C’est dans ce contexte que l’OIE met en œuvre un certain nombre de projets dont le projet P3V dans deux pays pilotes à savoir le Sénégal et le Togo.
De façon opérationnelle, le projet P3V vise trois objectifs spécifiques :
- la mise en place d’un cadre institutionnel permettant un développement harmonieux et cohérent des différentes catégories du personnel vétérinaire, dont les PPV ;
- le renforcement des compétences des PPV par l’amélioration de la formation initiale et continue ;
- le développement d’un cadre socio-économique durable en vue de la facilitation de l’insertion professionnelle des PPV.
Concernant le renforcement des compétences des PPV, le projet P3V avec ses partenaires comme l’École Inter-Etats des Sciences et Médecine Vétérinaires (EISMV) de Dakar et le réseau FAR, entend conduire plusieurs activités qui vont concerner dans un premier temps, quatre instituts cibles dont deux par pays, à savoir :
- l’Université du Sine Saloum El Hadj Ibrahima Niass (USSEIN), Sénégal ;
- l’Institut supérieur de formation agricole et rurale (ISFAR) de l’Université de Bambey, Sénégal ;
- l’Institut supérieur des métiers de l’agriculture (ISMA) de l’Université de Kara, Togo ;
- l’Institut national de formation agricole (INFA) de Tové, Togo.
Ainsi, durant la phase pilote du projet, il est entre autres prévu des appuis à la consolidation des curricula de formation de PPV, la production de ressources pédagogiques et numériques avec une plateforme de formation, des appuis aux formations pratiques en mettant un accent particulier sur les sciences cliniques et l’organisation des ateliers de capitalisation et d’échanges de bonnes pratiques entre établissements.
Pour tout échange avec des parties prenantes intéressés, l’équipe du projet P3V reste disponible et peut être contacter aux adresses b.souley@oie.int et/ou s.fevre@oie.int.
Diplômé de l’EISMV de Dakar, Bachir Souley Kouato est titulaire d’un PhD en Science vétérinaire de l’Université de Liège. Il est basé à la Représentation Régionale de l’OIE pour l’Afrique à Bamako, en tant que Coordonnateur Technique Régional du Projet “Professionnalisation des ParaProfessionnels Vétérinaires (P3V)”.