L’agroécologie pour sortir des pesticides. Guides et supports de formation

Dans quel contexte se développe l’expérience ?

L’accroissement de la consommation et les lacunes dangereuses des conditions d’application des pesticides et produits vétérinaires se révèlent de plus en plus préoccupants dans le monde et en particulier en Afrique de l’ouest. Dans cette région, l’utilisation de ces produits reste certes limitée en volume en raison de la pauvreté mais les règles d’homologation étant moins strictes et les contrôles difficiles, on y retrouve bien souvent des pesticides interdits ailleurs en raison de leurs impacts sur la santé et/ou l’environnement.

Aussi les producteurs / éleveurs manquent souvent de formations dans ce domaine, et se retrouvent à utiliser des produits non adaptés et sans respecter les normes sécuritaires d’application.

Quelle a été la zone d’intervention de l’expérience ?

Ces expériences de formation ont été menées en partenariat avec des Organisations de Producteurs au Nord Togo, à Velingara Casamance au Sénégal, et à Kita au Mali. Tous ces territoires d’Afrique de l’Ouest se situent en zones cotonnières, et présentent des problématiques similaires d’usage croissant de pesticides et produits vétérinaires, pour la culture du coton et l’intensification de l’activité d’élevage.

Quels sont les objectifs visés ?

L’objectif des formations est, d’une part, de fournir les éléments clés de diagnostic des modalités d’usage et d’application des pesticides et produits vétérinaires et de sensibilisation des risques liés à ces usages, et d’autre part, d’illustrer la diversité des alternatives agroécologiques permettant aux paysans et techniciens d’éliminer l’usage des pesticides dangereux tout en préservant leurs productions végétales et animales.

Quels sont les acteurs principaux et leurs rôles ?

Les différentes formations réalisées au Togo, Sénégal, Mali et Côte d’Ivoire, ont été mises en œuvre dans le cadre de projets en partenariat avec des organisations de producteurs, et en lien avec les services techniques.

Par exemple au Nord Togo en 2014, la formation avait réunie 42 participants dont 22 responsables paysans membres de l’organisation paysanne partenaire, l’union régionale des producteurs de céréales de la région des savanes – UROPC-S – et une vingtaine de techniciens de divers organismes, dont l’Institut de Conseil d’Appui Technique (ICAT). L’ICAT a par la suite poursuivi des formations à travers ses conseillers.

Les organisations de producteurs mobilisent les agriculteurs.trices qui sont fortement impliqué(e)s dans les différents modules mis en œuvre de manière participative et interactive. Les formations collectives de 20 à 30 paysan(ne)s et technicien(ne)s peuvent être réalisés par des binômes technicien/paysan formateurs.

Par la suite, la publication du guide de formation a été réalisée avec le soutien de l’Agence Française de Développement (AFD).

Quelles sont les principales activités menées ?

Différents modules ont été conçus et enrichis progressivement dans le cadre des formations mises en œuvre en Afrique de l’Ouest depuis 2014. Tout d’abord, une attention particulière est accordée à la réalisation de diagnostics villageois participatifs afin de connaître les principaux problèmes induits par l’usage de pesticides, leur mode de gestion et les alternatives agroécologiques déjà existantes.

Sur la base du diagnostic, différents modules de formation peuvent être dispensés de manière indépendantes :

• • Connaissance des formes de toxicité et effets négatifs des pesticides et produits vétérinaires sur l’homme, sur les animaux et sur l’environnement, et mesures permettant de prévenir les risques liés à leurs usages ;
  • Mise en évidence d’usages plus raisonnés de ces produits et valorisation de la diversité des alternatives, aussi bien pour les productions végétales qu’animales, et fournir des capacités d’adaptation de ces alternatives aux situations locales ;
  • Actions collectives permettant de renforcer l’application (ou de faire évoluer) les réglementations concernant l’usage de ces produits et de créer des conditions favorables au développement des alternatives.

Diagnostic sur la conduite d'élevage à Baty, Sénégal

Observation de la texture du sol entre formateur et participant à Velingara, Sénégal

Groupe de discussion sur les moyens de production à Baty, Sénégal

Le "Thiekè dié djibini béthié", plante médicinale utilisée en pratique ethnovétérinaire à Baty, Sénégal

Diagnostic sur les liens entre productions animales et végétales à Velingara, Sénégal

Diagnostic sur la conduite d'élevage à Baty, Sénégal

Travaux de groupe lors de la formation de formateurs à Velingara, Sénégal

Travaux de groupe lors de la formation de formateurs à Velingara, Sénégal

Rencontre avec L.Biaye dans sa ferme agroécologique de production de plantes médicinales à Djimini, Sénégal

Diagnostic participatif villageois à Saré Mamadou, Sénégal

Diagnostic d'identification des ravageurs dans un champ de maïs à Kobala, Mali

Observation de chenilles légionnaires sur un pied de maïs à Kobala, Mali

Photo : Alice VILLEMIN / AVSF

Comment ont été identifiés les besoins en formation ?

Le diagnostic participatif, réalisé en amont ou pendant la formation permet de mieux cerner les besoins et demande en formation. La construction et l’enrichissement des modules a aboutit à la publication d’un guide de formation en 2020. Il se veut une boîte à outils permettant le développement de supports de formation adaptés au contexte et au public précis visé. Chaque formateur ou formatrice utilisant le guide doit donc élaborer les supports les plus adaptés au cadre de la formation-sensibilisation délivré.

En fonction des profils des participants aux formations et de leurs attentes, les modules de formation proposés et la majorité des thèmes qui les composent peuvent être abordés de manière indépendante.

Comment est financée cette expérience ?

Jusqu’à présent, les formations ont été financées dans le cadre de projets de développement dans différents pays d’Afrique de l’Ouest. La plupart des formations ont été mises en œuvre pour des groupes de 20 à 30 paysan(ne)s et technicien(ne)s, mobilisé(e)s durant 3 à 5 jours, de façon à aborder différents modules.

Avec la publication du guide de formation, des formations de formateurs.trices ont été réalisées, entre autres dans le cadre d’un projet de recherche-action en partenariat avec la recherche (FAIR Sahel). Avec les formations de formateurs, l’ambition est de démultiplier les capacités de formation et d’intégrer la mise en œuvre de ces modules au sein de centres de formation paysans ou d’organisme de conseil et de vulgarisation.

Comment est prise en compte l’agroécologie dans les activités ?

Le guide de formation est conçu à l’usage direct de responsables d’OPA et des techniciens engagés dans l’accompagnement des transitions agroécologiques. Il s’agit de partir des pratiques des agriculteurs.trices parfois engagé(e)s dans la « routine » d’usages non maitrisés de pesticides et produits vétérinaires, et commencer par les sensibiliser à des pratiques moins risquées et plus efficientes de ces intrants.

L’autre élément essentiel de la formation est la mise en lumière des diverses possibilités et avantages des alternatives agroécologiques :

• • • pratiques préventives contre la prolifération de ravageurs et lutte biologique en production végétale,
    • prévention des maladies par les pratiques zootechniques et pratiques ethnovétérinaires pour les productions animales.

La démarche de formation présente l’originalité d’aborder à la fois les alternatives agroécologiques en production végétale, mais aussi les interactions avec l’élevage et la santé environnementale (approche One Health) en s’appuyant aussi bien sur les savoirs traditionnels ayant fait leurs preuves que sur les connaissances scientifiques les plus récentes.

Quels sont les principaux conseils que vous donneriez pour mener une expérience telle que celle décrite ?

• • 1. La préparation et l’animation des formations par un binômes technicien(ne)es/paysan formateurs, afin de renforcer les apprentissages mutuels et de valoriser les différentes formes de savoirs pour s’orienter vers des alternatives aux pesticides adaptées aux contexte local
    2. Favoriser la participation des femmes, à la fois dans le diagnostic participatif et dans les modules de formation, d’autant plus qu’elles peuvent renforcer la prise de conscience des impacts sur la santé humaine des pesticides
    3. S’assurer de la contribution de professionnels de santé lors de la formation, avec une bonne maitrise des risques de toxicité aiguë et chronique liés à l’usage des pesticides et de certains produits vétérinaires
    4. S’appuyer sur des animateurs.trice à l’écoute des savoirs locaux des paysans et paysannes et également capable de “traduire” des savoirs techniques et scientifiques pour les rendre compréhensibles à d’autres. En d’autres termes, développer un rôle de médiateur et intermédiaire entre différentes formes de connaissances
    5. Prévoir un temps d’adaptation du contenu de la formation au contexte local, incluant la traduction et l’adaptation des différents supports pédagogiques en langue locale.

Ressources

Guide de formation AVSF : l’Agroécologie pour sortir des pesticides
Télécharger le guide

En plus du guide complet, les documents de base pour l’adaptation de la formation dans différents contextes et situations sont disponibles et téléchargeables librement sur le site d’AVSF : présentations powerpoint génériques des modules, document word du guide avec accès aux schémas et illustrations.