Outil d’auto-diagnostic pour évaluer la prise en compte du genre dans un centre de formation agricole et rurale
Le séminaire international « Comment mieux prendre en compte le genre dans la formation agricole et rurale ? », qui s’est tenu du 17 et 19 septembre 2024 à Abidjan en Côte d’Ivoire, a été l’occasion pour les participants de participer à la construction d’un outil d’auto-diagnostic pour évaluer la prise en compte du genre dans un centre de formation agricole et rurale.
Retour sur le processus de construction de l’outil
Cette construction s’est déroulée en quatre temps :
- Réflexion en groupes (3 groupes d’une trentaines de participant.e.s), le 17/9 après-midi
Les participant.e.s étaient invité.e.s à lister des points qui devraient être pris en compte dans un outil de (auto-)diagnostic sur le genre pour les centres de FAR.
Si vous deviez vous interroger sur la manière dont le genre est intégré dans un centre FAR, quels sont les aspects que vous allez vérifier ? Quels éléments faudra-t-il regarder de près pour identifier les domaines où le centre pourrait faire encore mieux pour accueillir les femmes ou filles, les soutenir pour réussir et les préparer à leur insertion professionnelle future ?
- Synthèse des travaux de groupes et construction d’une proposition d’outil
Les consultants recrutés pour assister le Réseau FAR dans la préparation et le déroulement du séminaire ont élaboré une proposition d’outils à partir des différentes réflexions des groupes. La Direction Exécutive du Réseau FAR a revu la proposition de l’outil et l’a présentée en plénière aux participant.e.s (18/9 matin).
Outil d'autodiagnostic (draft)
- Test de l’outil par les participant.e.s lors des visites de terrain
Les participant.e.s ont été réparti.e.s en 3 groupes pour visiter 3 sites le 18/9 après-midi : (1) l’institut national de la formation professionnelle Agricole, INFPA, à Bingerville, (2) le centre d’incubation du lycée technique à Cocody, et (3) le centre de formation ANADER à Bingerville. Ils ont pu tester l’outil lors de ces visites.
- Retours et partages des réflexions
Le 19/9 matin, les rapporteurs des 3 groupes ont partagé en plénière leur retour sur la visite de leur groupe et leurs réflexions sur l’outil testé.
Groupe 1 – INFPA, Bingerville
Groupe 2 – Centre d’incubation du lycée technique, Cocody
Groupe 3 – Centre de formation ANADER, Bingerville
Synthèse des échanges sur l’outil
- L’outil proposé est une bonne base de travail.
Il y a un consensus sur les points d’attention.
- L’outil doit être pensé comme un guide d’entretien de compréhension.
L’outil doit être adapté selon les réalités locales. Le questionnaire qui en découle doit être adapté selon les cibles et le contexte. Il est essentiel de tenir compte des réalités locales pour adapter les questions afin de ne pas froisser nos interlocuteur.ice.s. Les établissements étatiques et les établissements privés ne connaissent pas du tout les mêmes enjeux au niveau de la prise en compte du genre. Il convient d’avoir un outil pour chaque cas de figure, et d’adapter les questions selon les cultures et le contexte de nos interlocuteur.ice.s.
- Importance de la posture de celui ou celle qui réalise le diagnostic
Pour obtenir des informations, il faut savoir à qui s’adresser, et adopter la bonne posture pour ne pas créer des résistances. Il faut que les enquêteurs aient une bonne connaissance du terrain au préalable avant d’enquêter. Ne pas enquêter dans un objectif de « questions genre » au risque de bloquer les interlocuteur.ice.s mais avoir l’objectif de mieux comprendre la réalité locale. Importance de la capacité d’adaptation et de la neutralité. Savoir aborder certaines questions en petits groupes, parfois en groupes non mixte. Importance de la préparation des entretiens.
- Importance du traitement de la confidentialité des données individuelles
Dès lors que l’outil inclut des questions personnelles et individuelles, les bonnes pratiques en termes de recherche auprès de sujets humains et de confidentialité des données doivent être suivies.
Les principales bonnes pratiques sont les suivantes :
- Consentement éclairé : Obtenir le consentement explicite et informé des individus avant de collecter leurs données. Ils doivent savoir pourquoi leurs données sont collectées, comment elles seront utilisées et qui y aura accès.
- Collecte minimale : Ne recueillir que les informations nécessaires pour l’objectif spécifique. Éviter la surcollecte de données non pertinentes.
- Transparence : Fournir aux répondants des informations claires et accessibles sur les pratiques de collecte et d’utilisation des données (via des politiques de confidentialité, par exemple).
- Sécurité : Mettre en place des mesures de sécurité appropriées (chiffrement, contrôles d’accès) pour protéger les données contre les accès non autorisés ou les fuites.
- Limitation dans le temps : Conserver les données personnelles uniquement pour la durée nécessaire à l’objectif défini.
- Partage limité : Ne partager les données avec des tiers que si c’est nécessaire et après avoir informé les individus concernés.
- Conformité avec les lois : Respecter les régulations en vigueur (comme le RGPD en Europe) concernant la collecte, le traitement et la protection des données.
En particulier, pour la collecte de données sur des questions sensibles, telles que la violence, l’hygiène menstruelle ou la santé sexuelle et reproductive, il est essentiel de suivre des protocoles éthiques additionnels tels que :
- Anonymisation et pseudonymisation : Dans la mesure du possible, anonymiser ou pseudonymiser les données pour réduire les risques d’identification des individus, notamment lors du partage ou de l’analyse des données.
- Limitation des finalités : Les données sensibles doivent être collectées pour des objectifs spécifiques et légitimes, comme la recherche, le soutien aux victimes ou l’amélioration des services de protection. Il est essentiel de ne pas utiliser ces données pour d’autres finalités sans consentement supplémentaire.
- Mesures de soutien aux victimes : Assurer que les méthodes de collecte ne mettent pas en danger les victimes. Par exemple, il est crucial d’adopter des méthodes discrètes et sécurisées lors de la collecte de données auprès de victimes de violence, afin d’éviter toute exposition supplémentaire à des risques.
- Accompagnement ou référencement : les enquêtrices doivent pouvoir adresser les femmes qui demandent une aide vers des services appropriés. Si de tels services n’existent pas, il pourra être nécessaire de mettre en place des structures de soutien à court terme aux fins de l’étude.
- Tous les membres de l’équipe de collecte doivent être sélectionnés avec soin, recevoir une formation spécialisée et bénéficier d’un soutien continu.
- Des questions sur la violence ne devraient être intégrées à des enquêtes portant sur d’autres sujets que si les conditions à respecter en matière d’éthique et de méthodologie peuvent être satisfaites.
- Sensibilité de certains points
Certaines questions peuvent être particulièrement sensibles, sur le harcèlement et les violences basées sur le genre par exemple. Selon le contexte, il faut peut-être ne pas aborder certains points ou utiliser des techniques pour obtenir des informations sans aborder clairement ces questions.
- Tenir compte de l’existant
Le groupe FIP[1] a élaboré 10 questionnaires de diagnostic du genre dans la formation professionnelle. Ils sont destinés notamment aux centres de formation, aux enseignants, aux responsables, etc. Ils sont accompagnés d’une note de contextualisation et d’une note méthodologique, sur l’utilisation de ces questionnaires.
Outil de diagnostic du genre dans la formation professionnelle
Par ailleurs, plusieurs fiches de capitalisation ont été réalisées par les différents membres du groupe FIP, à la suite de l’utilisation des questionnaires (ou en parallèle).
[1] Le groupe FIP a été créé en 2014 par quelques acteurs de la formation professionnelle afin qu’ils puissent échanger régulièrement, améliorer leurs pratiques et élaborer des solutions concrètes pour renforcer la qualité des actions. L’objectif principal est d’améliorer l’accès à l’emploi des jeunes. Premier groupe constitué autour de la question de la Formation et Insertion Professionnelle, il rassemble aujourd’hui cinq organisations françaises de solidarité internationale : Apprentis d’Auteuil, Acting for Life, Essor, le Gret et l’IECD. Les membres du groupe sont actifs dans plus de 41 pays en Afrique, Asie, Moyen-Orient et Amérique latine, et se réunissent plusieurs fois par an. L’AFD a apporté le soutien nécessaire à la création et au fonctionnement de ce groupe de travail.