[Paroles d’acteur] Parions l’égalité au Burkina Faso
“Les femmes ont pris conscience de leur rôle dans le ménage et de leurs compétences agricoles.” L’Union des MFR et Batik International ont mis en place pendant 2 ans au Burkina Faso des actions de sensibilisation et de formation – théâtre forum, atelier genre et leadership, etc. – pour lever les barrières à l’insertion socio-économique des femmes. Une dynamique genre qui s’inscrit le cadre du projet multi-pays Parions l’égalité (Tunisie, Sénégal, Burkina Faso, Mauritanie).
Dans quel contexte s’est développé l’expérience ?
Début 2022, un diagnostic multi-pays mené sous le prisme du genre (Tunisie, Sénégal, Burkina Faso, Mauritanie) dans les localités du projet a mis en évidence les fortes inégalités entre les femmes et les hommes en milieu rural. Étant assignées au rôle reproductif, c’est à dire au soin du foyer et de ses membres, tout en travaillant gratuitement sur l’exploitation familiale, les femmes cumulent de nombreuses heures de travail non rémunérées (en moyenne 15h30 par jour dans les zones étudiées), réduisant leur capacité à développer leur propre activité agricole ou à s’investir dans une formation agricole. A cela s’ajoutent des normes sociales restreignant leur circulation et leur accès aux ressources (matériel, revenus, animaux, terres…). Quand elles ont accès à ces ressources, elles en ont rarement le contrôle, ce qui entrave, de fait, le maintien de leurs activités.
Quelle a été la période et la zone d’intervention de l’expérience ?
L’expérience s’est déroulée pendant 2 ans, de 2022 à 2024, dans les localités de Lergho et Zabré (Centre-est), Manga et Toécé (Centre-sud) et Pella (Centre-ouest) au Burkina Faso.
Quels ont été les acteurs principaux et leurs rôles ?
Partenaires techniques :
- Union Nationale des Maisons Familiales Rurales du Burkina (UNMFR-B) : Chargée de la mise en œuvre à travers l’élaboration d’un diagnostic, la conduite des différents types de formation, l’appui à l’amélioration des conditions de travail (appui en intrants, matériel de transformation, noyaux reproducteurs…), l’accompagnement des femmes dans leur activité et la sensibilisation de leur entourage ;
- Union Nationale des Maisons Familiales Rurales d’Éducation et d’Orientation (UNMFREO) : Partenaire historique de l’UNMFR-B pour son appui pédagogique et technique ;
- BATIK International : Coordination du programme multi-pays dans lequel s’insère l’initiative présentée et appui au renforcement de la prise en compte du genre dans les activités ;
- Pouvoirs publics locaux : appui à la mise en œuvre des formations.
Partenaire financier : Agence Française de Développement (AFD)
Et toutes les femmes participant aux formations et aux sensibilisations (dites “bénéficiaires”)
Quelles ont été les principales activités menées ?
Sensibilisation de la communauté
- Information des leaders et des services techniques pour faciliter la mise en activité des femmes
- Théâtre forum sur la charge de travail des femmes et l’implication des maris
Formations techniques et entrepreneuriales
- Entrepreneuriat et élaboration de plans d’affaire ;
- Techniques d’embouche des petits ruminants ;
- Techniques d’élevage naisseur-engraisseur des ovins ;
- Transformation (étuvage du riz) et dotation en équipement pour l’étuvage ;
- Formation en maraîchage ;
- Formation de formateurs en gestion des AGR selon la méthodologie Germe niveau 1 du BIT
Ateliers genre, leadership et confiance en soi ;
Appui à la reconnaissance des coopératives simplifiées des femmes ;
Dotation en matériel et volailles.
Quels résultats avez-vous obtenu ?
- 159 femmes formées, accompagnées et renforcée matériellement (étuves, volaille, matériel agricole…) dans 5 localités. Elles ont aussi toute participé à au moins un atelier de renforcement du leadership et de la confiance en soi.
- 38 leaders et 150 maris informés et sensibilisés (1 théâtre forum mené et 5 sessions d’information aux leaders, mobilisation des maris lors des formations techniques)
- 3 coopératives enregistrées et reconnues légalement
Quels changements auprès des femmes qui ont été formées ?
- Prise de conscience de leur rôle dans le ménage et de leurs compétences agricoles, renforcement de leur confiance en elle ;
- Amélioration de leurs activités génératrices de revenus (tenue de cahier de compte, meilleur équilibre offre/demande) ce qui a entraîné une amélioration des conditions de vie (3 repas/jour, scolarisation des enfants, notamment des filles) ;
- Implication de leurs enfants filles, comme garçons dans le travail, il n’y a plus de différence entre les deux dans le traitement.
Quels changements au sein de votre structure ?
- Amélioration dans l’approche genre ;
- Facilité à mener des diagnostics ;
- Facilité à faire des plaidoyers.
Quels changements sur votre territoire ?
- Prise de conscience des leaders sensibilisés sur la charge de travail des femmes ;
- Accompagnement de certains leaders pour plaider pour l’accès des femmes à la terre ;
- Prise de conscience de certains maris sur leur rôle dans le foyer à aider les femmes dans les différents travaux.
Quels sont les conseils que vous donneriez pour mener une expérience telle que celle décrite ?
Pour mener une telle expérience et à la lumière des leçons apprises, nous conseillons de :
- Aménager des terres et les sécuriser au profit des jeunes et des femmes ;
- Se doter en matériel et équipements agricoles ;
- S’équiper en petits ruminants (caprins et ovins) les jeunes et les femmes après les formation en élevage ;
- Faciliter l’accès des femmes au financements (microcrédits) pour renforcer ou mener leurs activités génératrices de revenus ;
- Poursuivre la sensibilisation pour accroître l’accès des jeunes et des femmes aux terres à travers une législation.
Estelle KOITA
Union Nationale des Maisons Familiales Rurales du Burkina Faso
Manon DRONIOU,
Batik International