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Réseau FAR

27
Sep
2024

[Paroles d’acteur] Tchad / Alphabétisation fonctionnelle des femmes membres des organisations paysannes

Les femmes voient leur vie quotidienne facilitée, leur vie professionnelle plus efficace et leur vie familiale et personnelle plus équilibrée.” Ce dispositif d’alphabétisation porté par Agriculteurs français et développement international (Afdi) et le Conseil National de Concertation des Producteurs et Ruraux du Tchad (CNCPRT) au Sud du Tchad, et qui s’est achevé en 2023, a permis à plus de 2 000 femmes d’apprendre à lire et écrire mais aussi de prendre la parole en public et d’animer des réunions. Avec des changement induits par le projet sur les femmes mais également dans les foyers et dans la communauté.
Cette expérience est l'une des 24 initiatives innovantes de prise en compte du genre dans la formation agricole et rurale en Afrique qui a nourri le séminaire international Comment mieux prendre en compte le genre dans la formation agricole et rurale ?, qui a eu lieu du 17 au 19 septembre 2024 à Abidjan. Toutes les expériences

Dans quel contexte se développe l’expérience ?

Le Tchad est classé 190ème sur 191 pays selon l’indice de développement humain (PNUD, 2021). Le taux national d’alphabétisation est de 32% pour les femmes et 48% pour les hommes. En zone rurale, ces chiffres baissent considérablement avec 14% de femmes alphabétisées et 47% des hommes, relevant des inégalités frappantes d’accès à l’éducation, en particulier pour les femmes rurales.

L’analphabétisme et les inégalités d’accès à l’éducation renforcent les inégalités entre les hommes et les femmes au Tchad, et plus particulièrement en milieu rural. En matière de professionnalisation de l’agriculture, les femmes ont moins accès à des postes de responsabilité dans les organisations paysannes, elles ont plus de difficultés à se former et à restituer les formations à leurs pairs, freinant ainsi leurs capacités de mobilisation et d’animation.

Quelle est la période et la zone d’intervention de l’expérience ?

L’expérience a duré 4 ans, de mars 2019 à septembre 2023, dans les provinces du Mandoul et du Logone Oriental, dans le sud du Tchad.

Quels sont les acteurs principaux et leurs rôles ?

  • Afdi, une association de solidarité internationale crée en 1975 qui soutient les agricultures familiales, accompagne des organisations paysannes (OP) des pays en développement et sensibilise le monde agricole français au développement ;
  • Aster International, un réseau d’expertise sur le genre basé en France qui apporte une expertise transversale sur le genre (diagnostic, formation, changements sociaux) ;
  • Lead Tchad, une ONG tchadienne œuvrant dans les secteurs de l’environnement, du genre, et de l’éducation non formelle, qui met en œuvre aux côtés d’Afdi l’alphabétisation (conception des modules, formation des facilitateur.trice.s, alphabétisation pratique) ;
  • Le Conseil National de Concertation des Producteurs et Ruraux du Tchad (CNCPRT), plateforme des OP du Tchad qui fait le lien avec 3 OP régionales, la FCEJARLOR (Fédération des Cellules des Jeunes Agriculteurs du Logone Oriental), Atekor et Aprofikam (Association pour la promotion de la Filière Karité) ; il participe à la capitalisation, est chargé de la diffusion au Tchad et du portage des résultats et des plaidoyers auprès de l’État.

Quelles sont les principales activités menées ?

  • Un diagnostic initial sensible au genre a permis de faire l’état des lieux de la situation initiale, identifier les lieux pour l’ouverture des centres, les thématiques d’alphabétisation et de formation mais aussi les points de blocage socioculturel qui pourraient faire obstacles à la mise en œuvre du projet ;
  • Des séances de sensibilisation ont été développées pour lever les freins au développement des activités dans les villages et auprès des groupements ;
  • L’alphabétisation a permis aux femmes de lire et écrire mais aussi de prendre la parole en public et d’animer des réunions ;
  • Des formations en atelier Réflexion Action (ARA) entre femmes ont été développées sur des sujets liés à la place de la femme dans la communauté. Ces formations avec les outils MARP (Méthode Accélérée de Recherche Participative) permettent également aux femmes de développer des stratégies pour mieux communiquer avec leurs maris. Elles ont permis aux femmes de mieux comprendre les enjeux de genre, connaître leurs droits et réfléchir au sein de leur foyer aux inégalités entre les enfants (dégager du temps pour permettre aux filles d’étudier) ;
  • Les formations en conseil à l’exploitation familiale (CEF) ont outillé les femmes pour la gestion des ressources de la famille ;
  • Un diagnostic final a permis de faire un état des lieux à la fin du projet pour constater les changement induits par le projet sur les femmes mais également dans les foyers et dans la communauté.

Quels résultats avez-vous obtenu ?

Le projet a permis d’atteindre des résultats de plusieurs types :

  • Un dispositif et une méthode d’alphabétisation innovants ont été conçus, capitalisés et portés par le collège des femmes du CNCPRT pour un passage à l’échelle : un guide d’alphabétisation, un parcours de formation des facilitateurs et des centres de gestion, un parcours de formation des paysannes relais et 3 outils CEF, un guide méthodologique pour la certification ont été élaborés et diffusés ;
  • 2 716 femmes se sont inscrites à au moins une campagne d’alphabétisation et 2 245 ont vu leurs capacités renforcées, ainsi que 247 hommes ;
  • 88 paysannes relais de 2 régions ont été formées aux outils CEF et 13 d’entre elles au moins animent des groupes de productrices (1 633 au total) pour la gestion technique et financière de leurs activités ;
  • 3 OP, opératrices d’alphabétisation et 24 centres ont été accompagnés et renforcés ;
  • 1 002 apprenantes et 31 apprenants ont obtenu leur certification ;
  • 115 femmes, leaders du CNCPRT et des OP provinciales, ont été renforcées dans leur leadership et dans leurs rôles citoyen et politique ;
    • 24 responsables nationales du collège des femmes ont été formées au plaidoyer ;
    • 7 collèges des femmes provinciaux ont été restructurés et redynamisés et un plan d’action du collège des femmes national a été élaboré ;
    • 90 paysannes relais ont été formées et accompagnées à animer des groupes (ateliers de réflexion-action).

Quels changements auprès des femmes qui ont été formées ?

Grâce à l’alphabétisation, aux formations reçues et à l’appui des paysannes relais, les femmes sont confiantes de leurs talents, développent de belles initiatives de production, de transformation et de commercialisation de produits de meilleure qualité. Elles voient leur vie quotidienne facilitée (orientation à l’hôpital, lecture des documents administratifs, des notices de médicaments, etc.), leur vie professionnelle plus efficace (compétences économiques, prise de décisions éclairées, capacités de défendre leur point de vue) et leur vie familiale et personnelle plus équilibrée (éducation des filles, dialogue avec les maris…).

Quels changements au sein de votre structure ?

Ce projet a permis aux équipes d’Afdi et de ses partenaires de renforcer leurs capacités en matière de genre, à travers les différentes formations et ateliers et la mise en œuvre du projet : enjeux de genre, spécificités au Tchad, méthodes de concertation et de diagnostics, outils de réflexion, etc. Cela a contribué à la stratégie genre d’Afdi. L’ensemble des acteurs du projet (salarié.es des OP, responsables, paysannes relais, facilitateurs.trices) ont été formés à différents niveaux aux enjeux de genre. Ils sont mieux sensibilisés aux inégalités et aux leviers pour les réduire.

Quels changements sur votre territoire ?

100% des époux des apprenantes, les chefs de villages, familles, habitant.es et acteur.es, questionnés dans les 24 localités ont exprimé leur satisfaction vis-à-vis de l’alphabétisation des femmes. Au-delà de leur capacité à lire, écrire et calculer, ils trouvent que les alphabétisées ont changé positivement de comportement. Les craintes de départ formulées sur l’alphabétisation des femmes ont disparu et sont remplacées par des propos positifs dans le diagnostic final : amélioration de la division sexuelle du travail (dans 82% des ménages des femmes agricultrices ayant suivi l’alphabétisation, les hommes et les garçons s’impliquent progressivement dans les travaux domestiques), réduction des violences basée sur le genre (97% de enquêté.es pensent qu’il y a diminution des violences conjugales et de la consommation d’alcool)…

 Quels sont les conseils que vous donneriez pour mener une expérience telle que celle décrite ?

1. Soigner les diagnostics initiaux et finaux pour une bonne compréhension des changements ;
2. Mettre les bénéficiaires au cœur des actions : les impliquer dans la définition, l’élaboration et la mise en œuvres des activités, ainsi que leurs modalités (calendrier, localisation, ambitions…) ;
3. Adapter les ambitions aux capacités des acteurs locaux et des bénéficiaires ;
4. Impliquer les autorités traditionnelles et religieuses dans le processus, ce qui permet de les crédibiliser et de lever les obstacles à la transformation sociale ;
5. Mettre en place une approche genre transversale permettant de lever les freins à la mise en œuvre des activités et donnant aux résultats et changement une dimension plus importante.

Djasrangar DJAMADJIBEYE
Coordonnateur AFDI Tchad
afdi.tchad@afdi-opa.org
www.afdi-opa.org

 

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