[Paroles d’acteur] Togo / “Anckely gnim”, une microfinance du réseau des femmes Anckely pour financer leurs activités agricoles

Dans quel contexte se développe l’expérience ?

En 1990, une centaine de paysans sont venus demander de l’emploi auprès de Sam DJOBO, Directeur du centre de formation agro-écologique CFAES-SOS et fondateur de l’ONG GRADSE. Un premier chantier école a été mis en place : les paysans devaient apprendre tout en participant à la réalisation d’un projet agro-forestier. De cette expérience, les paysans ont ressenti la nécessité de transcender l’individualisme des uns et de travailler en groupe. Des rencontres ont notamment permis de constater qu’il existait auparavant des formes d’organisation traditionnelles de travail, axées sur l’entraide et la solidarité.

En 1991, cette première prise de conscience a amené à la création de l’Union des Organisation Paysannes (UOP) Anckely, qui incluait le réseau des femmes Anckely (RFA).

En 2000, les difficultés d’accès des crédits aux femmes pour leur installation et leur insertion ont amené l’ONG GRADSE à constituer des groupes d’épargnes et de crédits au sein de l’UOP qui deviendra plus tard une microfinance appelée “Anckely gnim”.

Quelle est la période et la zone d’intervention de l’expérience ?

La microfinance interne “Anckely gnim” a été créée en 2000, et existe de nos jours en 2024, dans les régions Centrale et Kara au Togo.

Quels sont les acteurs principaux et leurs rôles ?

Les différents acteurs impliqués dans ce programme sont :

• les producteurs agricoles. Ce sont les bénéficiaires des actions de l’ONG GRADSE ;
• le réseau des femmes Anckely estimés à 3000 femmes. Organisé en groupe d’épargne et de crédit, ce sont les bénéficiaires des crédits de la microfinance “Anckely gnim” ;
• l’ONG GRADSE est la structure accompagnatrice des femmes et formation sur l’épargne et le crédit.

Les partenaires technique et financiers sont :

• l’association française “Acting for life” (pour le renforcement des capacités des femmes du réseau, avec la mise en place d’une unité de transformation des fruits en jus) ;
• l’association suisse “EmpAct” (octroi de fond à la microfinance à hauteur de 155 000 euros) ;
• le ministère du Développement à la Base (formation des femmes sur l’élaboration des plans d’affaires) ;
• le ministère de l’Agriculture de l’Élevage et de Développement Rural (pour les formations en agroécologie et d’équipement agricole)

Quelles ont été les principales activités menées ?

Des services financiers

• Sensibilisation sur l’entreprenariat ;
• Formation sur l’élaboration d’un plan d’affaires (PA), éducation et gestion financière, stratégie d’innovation via l’outil SCAMPER, GERME, Outils Profina de la GiZ ;
• Orientation vers des filières ou chaines de valeur porteuses ou à forte valeur ajoutées ;
• Idéation-appui à l’élaboration des plans d’affaires/revue de qualité des PA ;
• Accompagnement dans la mise en œuvre des plans d’affaires ;
• Suivi et évaluation de la mise en œuvre des plans d’affaires ;
• Organisation des visites d’échanges d’expériences ;
• Octroi de crédits.

Des services non financiers

• Formation sur la production animale, végétale et l’agro-transformation ;
• Synergie Genre Agro Business (SyGAB) ;
• Farmer Business School (FBS) ;
• Facilitation de l’accès aux facteurs clés de production pour une meilleure installation des femmes ;
• Accès au foncier surtout pour les femmes : sensibilisation des chefs de ménages, les propriétaires terriens, melkisation des terres agricoles au niveau local ;
• Accès au marché : formation sur l’approche Value Links, recherche de marché, contractualisation, construction des magasin et hagard de marché ;
• Accès à l’information : adhésion aux interprofessions, utilisation des réseau sociaux, ventes en ligne, inscription sur les plates formes de vente, écoute des médias ;
• Accès aux services : implication des agents du conseils agricole, mise en contact avec les fournisseurs d’intrants et équipements.

Bas fond aménagé

Bas-fond victime de sècheresse

Bas-fond victime de sècheresse

Champ de tomate victime du stress hydrique

Confection d'une diguette avec une daba pour la maîtrise de l'eau sur bas-fond

Distribution du matériel d'entretien des bas-fonds amenagés

Distribution du matériel d'entretien des sites de bas-fond amenagé

Distribution du matériel d'entretien des sites de bas-fond amenagé

Femme entrain de commenter une image lors de la formation sur la Synergie Genre et Agrobusiness

Femme entrain de commenter une image lors de la formation sur la Synergie Genre et Agrobusiness

Femme mentor en pleine formation dans le village de Aou-Mono

Stress hydrique de la tomate

VIsite d'un elevage d'une femme du village d'Aguidagbadè

Quels résultats avez-vous obtenu ?

En termes de résultats obtenus, nous pouvons citer principalement :

• une microfinance ” Anckely gnim” mise en place, impliquant 3000 femmes ;
• 30 groupes d’épargnes et de crédits mis en place ;
• 10 ateliers de cuisson de gari construits ;
• un centre médico-social mis en place pour améliorer l’accès des femmes aux soins de santé ;
• 20 cases de santé construites dans les villages pour améliorer l’accessibilité géographique des femmes aux soins de santé ;
• une centrale d’approvisionnement en médicaments mise en place pour améliorer l’accessibilité financière des femmes aux soins de santé ;
• une unité de séchage des fruits et légumes mise en place au profit des femmes pour leur apprentissage et l’amélioration de leur revenu ;
• une unité de transformation des fruits en jus mise en place pour leur apprentissage et l’amélioration de leur revenu ;
• 97 709 euros de crédits en cours (64 millions FCFA) ;
• 10 magasins de stockage des produits agricoles construits au profit des femmes agricultrices ;
• 114 égreneuses distribués avec l’appui de Ministère de l’Agriculture ;
• 5 000 jeunes formés dont 1 500 filles avec l’appui du Ministère du Développement à la Base.

Quels changements auprès des femmes qui ont été formées ?

Les changements constatés sont :

• l’amélioration de l’accès au financement des femmes de 30% ;
• l’augmentation du revenu des femmes de 50% ;
• l’augmentation de leur production de 50% ;
• l’amélioration de la prise en charge des enfants dans les ménages (éducation, soin de santé, habillement) ;
• la participation des femmes aux dépenses conjugales.

Quels changements au sein de votre structure ?

Les changements constatés au sein de notre structure sont :

• une meilleure visibilité de nos actions ;
• l’acquisition d’expérience et de développement d’un nouveau pôle d’expertise dans l’insertion et l’installation des femmes ;
• le développement de nouveaux partenariats ;
• des invitations aux ateliers internationaux (au Burundi sur le financement du monde rural, au Sénégal sur le plaidoyer en faveur de l’accès des femmes aux financement).

Quels changements sur votre territoire ?

Les changements constatés au sein de notre territoire sont :

• de plus en plus des maisons construites en matériaux définitifs (en ciment et coiffées en tôle, alors qu’auparavant les maisons étaient en terres battues et coiffées de paille)
• l’augmentation du nombre de motos et vélos dans les villages ;
• l’augmentation du nombre de puits et forages ;
• l’augmentation du taux de scolarisation des enfants dans les villages ;
• la diminution des conflits liés au foncier.

Quels sont les conseils que vous donneriez pour mener une expérience telle que celle décrite ?

1. Impliquer tous les acteurs dans la mise en œuvre des actions et prendre appui sur les leaders communautaires ;
2. Mettre en place le système de caution solidaire pour éviter les impayés et les détournements d’objectifs du financement ;
3. Impliquer les époux des femmes dans la construction du projet et les sensibilisations ;
4. Initier des activités génératrices de revenus communes dédiées aux coopératives ;
5. Développer des partenariats afin de renforcer les fonds de la microfinance ;
6. Éviter de faire intervenir la gendarmerie en cas d’impayés.