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Réseau FAR

26
Mar
2025

[Paroles d’apprenant] Comment les jeunes diplômés des centres de formation agricole et rurale financent-ils le lancement de leur activité agricole ?

Les stratégies de financement se répartissent en deux catégories principales : celles, minoritaires, qui favorisent une installation rapide et celles, majoritaires, qui privilégient une approche progressive. Ces dernières devraient être davantage considérées par les politiques, stratégies et services financiers pour favoriser la création d’emplois décents des jeunes“. Megnini Kokou OPEKOU a soutenu son mémoire du master MIFAR en décembre 2024. Son étude analyse les stratégies de financement adoptées par les jeunes porteurs de projets issus des CFAR, en interrogeant les jeunes du centre SICHEM. Il nous partage ses principaux résultats.

Quelle problématique avez-vous souhaité explorer ?

Au Togo, plus de 75% de la population est jeune et l’agriculture représente un secteur de développement clé, contribuant à 40% de la richesse nationale. On estime à environ 120 000 le nombre de jeunes qui entrent chaque année sur le marché du travail et à 116 000 ceux formés annuellement dans les centres de formation agricole et rurale. Ces données suggèrent que l’entrepreneuriat agricole est un domaine prometteur et un important créateur d’emplois durables dans le pays. Un nombre croissant de jeunes se tournent vers cette forme d’entrepreneuriat. Toutefois, la majorité des jeunes formés pour s’installer, font face à de difficultés d’accès aux facteurs de production.

L’accès au financement adapté pour les jeunes est particulièrement préoccupant. Ceux qui se lancent dans l’agriculture éprouvent souvent des difficultés pour constituer de fonds pour démarrer leur activité. Peu d’entre eux parviennent à s’établir de manière durable et à créer leur propre emploi, en raison notamment de difficultés d’accès aux financements. Face à cette situation, certains jeunes arrivent à développer leurs propres stratégies pour obtenir ces ressources financières.

J’ai entrepris cette étude pour mieux comprendre les conditions d’installation des jeunes issus des CFAR au Togo. Mon mémoire s’intéresse à la question suivante : Comment les jeunes diplômés des centres de formation agricole et rurale financent-ils le lancement de leur activité agricole ? Quelles stratégies mettent-ils en place pour surmonter les obstacles financiers ?

Pour répondre à cette problématique, trente entretiens semi-directifs ont été menés avec des jeunes sortis du CFAR SICHEM porteurs de projets d’installation, dans différentes zones du territoire togolais. Des entretiens et des recherches ont également été réalisés auprès des structures et organisations impliquées dans le soutien à l’entrepreneuriat agricole des jeunes et dans leur financement.

L’objectif de cette recherche était d’analyser les stratégies de financement adoptées par les jeunes porteurs de projets issus des CFAR afin de formuler des recommandations visant à améliorer l’efficacité et la durabilité des dispositifs d’installation post-formation des jeunes.

Jeune installé depuis 3 ans au Sud du Togo et spécialisé en production maraichère et élevage de poules de race améliorée. Le financement a été possible grâce au soutien de la famille (tantes et oncles).

Jeune installé depuis 2 ans dans une ferme au Sud du Togo et spécialisé en production maraichère et élevages de poules de race améliorée. Le financement a été obtenu grâce au soutien d’une connaissance.

Pouvez-vous nous partager les principaux résultats de votre analyse ?

Les résultats de mon analyse ont mis en évidence plusieurs éléments clés :

Une diversité des stratégies et trajectoires de financement des jeunes :

  • Des typologies d’installation courantes : les jeunes optent pour diverses stratégies d’installation et de financement afin de lancer leur activité, principalement sur de petites fermes. Ils associent généralement l’agriculture à des activités de diversification et non agricoles, en fonction de leurs préférences et des ressources disponibles.
  • Des stratégies de financement privilégiées : une approche progressive est majoritairement utilisée, reposant sur la sollicitation de financements de petits montants au fil du développement du projet.
  • De multiples sources de financement : l’autofinancement, souvent rendu possible par la pluriactivité, domine. Il est complété par des prêts et dons familiaux, des apports d’associés, des crédits bancaires, des subventions et des crédits informels tels que les tontines.

D’autres facteurs limitants au-delà du financement : la réussite des projets agricoles des jeunes ne dépend pas uniquement de l’accès au capital financier, mais aussi d’autres conditions essentielles à leur installation.

  • Accès au foncier : un obstacle majeur pour les jeunes, leurs projets reposant souvent sur l’acquisition de terres et des investissements initiaux.
  • Importance du facteur humain : les jeunes formés développent des compétences techniques, des capacités de gestion et une vision entrepreneuriale essentielles à la réussite de leur projet.
  • Problème d’information plutôt que d’absence de soutien : les jeunes méconnaissent souvent les outils financiers et les services d’accompagnement disponibles, ce qui limite leur accès aux opportunités existantes.
  • Déficit d’accompagnement : un manque d’accompagnement accessible freine le processus d’installation des jeunes, notamment en ce qui concerne l’accès à l’information, la préparation des dossiers de financement, le conseil technique et la gestion des imprévus.

Une inadéquation des dispositifs financiers existants : bien que des mécanismes de financement pour l’installation des jeunes dans le secteur agricole existent, ils ne sont pas toujours adaptés aux spécificités de l’agriculture.

  • Une offre de financement inadaptée : les financements proposés ne correspondent pas toujours aux capacités d’investissement des jeunes et sont souvent trop standardisés.
  • Un manque de coordination des dispositifs financiers : l’absence de synergie entre les projets d’appui à l’employabilité des jeunes réduit leur efficacité.
  • Une faible intégration des centres de formation : les initiatives de soutien à l’employabilité des jeunes dans le secteur agricole n’incluent pas suffisamment les jeunes issus de l’enseignement agricole et rural.

Des lacunes dans la formation et l’insertion post-formation des jeunes :

  • La formation pratique ne couvre pas systématiquement la gestion financière.
  • L’insertion professionnelle des jeunes diplômés manque d’un accompagnement structuré.
  • Absence de mécanisme de suivi-évaluation pour les jeunes installés après leur formation.

En conclusion, les jeunes formés dans les CFAR au Togo suivent divers modèles d’installation en agriculture, déterminés par leur accès aux capitaux fonciers, humains et financiers. Cet accès est influencé par les dynamiques territoriales, leur parcours de vie et les systèmes d’activités qu’ils mettent en place. Une analyse approfondie de ces variations permet de concevoir des politiques et mécanismes d’appui mieux adaptés aux spécificités de chaque type d’installation agricole.

Jeune installé depuis 3 ans au Sud du Togo et spécialisé en production maraichère et élevage de poules de race améliorée vue du jeune sur sa parcelle de production maraichère installée derrière la maison familiale. Le financement a été possible grâce au soutien de la famille (maman).

Jeune installé depuis 4 ans au Sud du Togo et spécialisé en élevage de porcs de race améliorée et en charcuterie (abattage et vente de viande de porcs) sur un site qu’il a bayé. Le financement a été possible grâce au soutien d’une congrégation religieuse catholique et de crédit auprès des microfinances.

 

 

Comment allez-vous vous approprier ces résultats dans votre pratique ?

Les résultats de cette recherche seront mis à contribution pour accompagner la conception et la mise en œuvre d’approches et mécanismes innovants d’insertion et d’employabilité des jeunes en agriculture, spécifiquement adaptés aux réalités de financement du secteur agricole.

Cela implique pour moi, de contribuer à développer des solutions de financement flexibles et accessibles, tenant compte des particularités des activités agricoles et des besoins spécifiques des jeunes, afin de favoriser leur réussite et leur pérennité dans le secteur.

Capitaliser et valoriser les expériences d’installations des jeunes en agriculture

  • Mettre en place et animer des cadres de discussion sur les problématiques liées à l’installation des jeunes sortants des CFAR, afin de capitaliser et valoriser leurs expériences.
  • Soutien et amélioration des modalités de financement pour assurer leur reconnaissance dans le milieu professionnel et institutionnel. L’objectif est d’inciter les différents acteurs à soutenir ces stratégies de financement pour garantir la durabilité des installations agricoles des jeunes.

Améliorer l’accès des jeunes issus des CFAR aux services financiers

  • Développer une plateforme en ligne dédiée qui recense les instruments financiers disponibles, avec leurs critères d’éligibilité et modalités d’accès. Cette plateforme pourra également offrir des opportunités de financement participatif pour les projets agricoles des jeunes.
  • Mettre en place un service d’orientation et de mise en relation pour faciliter l’accès des jeunes aux outils financiers appropriés.

Adapter de nouvelles modalités de financement pour les installations des jeunes en agriculture, en développant à la fois des outils financiers innovants et des solutions alternatives.

  • Adaptation des mécanismes financiers de soutien à l’employabilité des jeunes en agriculture : développer de mécanismes financiers plus accessibles et flexibles, ainsi que l’exploration de nouvelles formes de financement (par exemple, financement participatif, partenariats public-privé) pour mieux répondre aux besoins spécifiques des jeunes.
  • Financement à faible taux : offrir des financements conséquents et à faible taux d’intérêt, inspirés des dispositifs tels que la dotation Jeunes Agriculteurs (DJA) en France ou l’AFOP au Cameroun.
  • Accès au foncier : créer un mécanisme d’accès sécurisé à la terre agricole pour soutenir les jeunes entrepreneurs agricoles.
  • Guichet unique de coordination : établir un guichet unique pour coordonner les mécanismes de financement agricole, sur le modèle du Centre Régional des Jeunes Entrepreneurs Agricoles et Agro-alimentaires (CRJEA) au Maroc.
  • Renforcement des organisations de jeunes producteurs : encourager la création ou l’intégration des jeunes dans des structures collectives pour leur permettre d’accéder à une gamme de services coordonnés (financement, marché, information, innovation).

Renforcer le dispositif de formation et d’accompagnement post-formation des jeunes

  • Mettre en place un fonds d’aide financière et de matériel de démarrage pour soutenir les projets d’installation des jeunes.
  • Développer un programme d’accompagnement pour la mise en place et le développement d’entreprises agricoles viables.
  • Diversifier les ressources financières nécessaires pour garantir la pérennité de ces dispositifs.
  • Intégrer l’éducation financière dans le programme de formation, en particulier dans les cours de formation entrepreneuriale.
  • Mettre en place un mécanisme de suivi et d’évaluation des jeunes après leur formation, afin d’assurer un accompagnement continu et ajusté à leurs besoins spécifiques.

L’aventure MIFAR, c’était comment ?

Le programme MIFAR se distingue par sa conception et son contenu, pertinents et riches répondant aux enjeux actuels du développement de l’agriculture rurale dans nos pays. Conçu dans un format alliant théorie et pratique, ce cours permet une meilleure compréhension des défis et des opportunités du secteur agricole. Bien que les cours soient denses, leur caractère innovant a facilité l’acquisition de nouvelles compétences pratiques essentielles pour la suite de ma carrière. MIFAR a également constitué un véritable espace de rencontre et de réseautage entre professionnels du monde agricole.

Megnini Kokou OPEKOU
Diplômé du master MIFAR
iciopekou@yahoo.fr

 

Analyse des trajectoires et stratégies de financement des projets d’installation des jeunes sorti(e)s des CFAR au Togo : cas du centre SICHEM

Kokou Megnini OPEKOU. Ce mémoire cherche à comprendre les conditions d’installation des jeunes diplômés des CFAR au Togo. L’étude porte sur les financements mobilisés par ces jeunes pour leurs projets agricoles.
Accéder au mémoire

 

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