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Réseau FAR

10
Jan
2024

Togo / Analyse collective de la formation continue des producteurs (master MIFAR)

Le système de formation continue agricole est-il adapté aux besoins des acteurs ? Une question à laquelle la deuxième promotion du master MIFAR a tenté de répondre en analysant le dispositif de formation des producteurs dans la région de Kpalimé au Togo. Durant 12 jours, ces 20 praticiens de la FAR venus de 7 pays d’Afrique sont partis à la rencontre de jeunes, de producteurs et productrices, d’acteurs de la formation et du conseil agricole pour mener un travail collectif de recherche-action. Kossi Kakpo, apprenant MIFAR, revient sur ce temps fort et nous partage les analyses du groupe sur ce dispositif togolais de formation ainsi que leurs recommandations.

Un stage réflexif au Togo pour questionner les processus de changement dans des systèmes de FAR

Le Master international en Ingénierie de la Formation Agricole et Rurale (MIFAR) est une formation diplômante de niveau master 2 initiée par le Réseau FAR et portée par trois institutions académiques que sont l’École Normale Supérieure d’Enseignement Technique et Professionnel (ENSETP) de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD), l’École Nationale d’Agriculture (ENA) de Meknès au Maroc et l’Institut Agro (Dijon et Montpellier). Il vise à renforcer les capacités des professionnels de la FAR à rénover en profondeur les dispositifs et les pratiques de formation agricole et rurale, en s’appuyant sur l’expérience des apprenants, la force du Réseau FAR et l’expertise des institutions académiques impliquées. La formation MIFAR se déroule sur une durée d’un an, majoritairement à distance, à travers la plateforme pédagogique en ligne de l’ENSETP et un module en présentiel (stage réflexif) qui se tient chaque année dans un pays membre du Réseau FAR.

Nous sommes 20 praticiens/professionnels de la formation agricole et rurale de sept pays d’Afrique (Togo, Cameroun, Bénin, Madagascar, Sénégal, République Démocratique du Congo et Tunisie) à être retenus pour faire partie de la deuxième promotion du MIFAR. Nous avons effectué un stage réflexif du 13 au 26 novembre 2023 à Kpalimé au Togo autour du module présentiel « Acteurs de changement dans un système de formation : enjeux, rôles, posture » sous la direction de la Professeure Betty WAMPFLER de l’Institut Agro Montpellier, France et du Professeur Mohamed EL AMRANI de l’École Nationale d’Agriculture de Meknès au Maroc.

Promotion 2023/2024 lors du module présentiel à Kpalimé, Togo

L’objectif de ce stage est de s’appuyer sur l’analyse d’une situation réelle et sur l’expérience des apprenants pour questionner les processus de changement à l’œuvre dans des systèmes de FAR au Togo et de questionner les compétences nécessaires aux formateurs pour être acteurs dans ce processus de changement. A partir de la commande de l’Association Professionnelle des Centres de Formation Agricole et Rurale (APCFAR) « Diagnostic de la formation continue agricole dans la zone de Kpalimé », nous avons exploré la problématique suivante « le système de formation continue actuel est-il adapté aux besoins des différents acteurs, coordonné aux autres services agricoles, durable et proposé à l’échelle ? ».

Méthodologie de l’étude

Pour répondre à la commande professionnelle de l’APCFAR, nous avons adopté une démarche méthodologique axée sur l’analyse qualitative, compréhensive et systémique. Les étapes de notre travail collectif de recherche-action se présentent comme suit :

  • Analyse du contexte et des acteurs du système de la FAR et des politiques de la FAR au Togo ;
  • Transformation de la commande en question de recherche (problématisation) ;
  • Choix de la méthode à mobiliser pour traiter notre problématique (méthode/analyse qualitative) ;
  • Construction d’une grille d’analyse d’un système de la FAR ;
  • Élaboration d’outils de collecte (guides d’entretien) par types d’acteurs ;
  • Collecte de données : enquête compréhensive auprès des acteurs de la FAR ;
  • Saisie (retranscriptions) et traitement des données ;
  • Analyse des données et synthèse des résultats ;
  • Restitution des résultats aux acteurs pour avoir leurs feedbacks.

Grille d’analyse ‘Producteurs’

Enquête de terrain des apprenant.e.s MIFAR auprès d’une coopérative de producteurs

Principaux résultats de notre travail collectif de recherche-action

Évolution des politiques publiques en lien avec la FAR au Togo

Nous avons fait une analyse diachronique et rapide de l’évolution des politiques publiques de formation agricole et rurale depuis le désengagement de l’État dans les années 1990 jusqu’à l’horizon 2023. Ainsi, nous pouvons distinguer trois phases d’évolution :

  • La première phase couvrant la période du désengagement de l’État jusqu’à 2009

C’est la phase au cours de laquelle la Formation Agricole et Rurale (FAR) est moins visible dans les politiques publiques c’est-à-dire qu’elle n’est pas priorisée dans les politiques publiques. En effet, dans les années 1990, il y a eu l’adoption du Programme d’Ajustement Structurel (PAS), qui a conduit à des réformes structurelles et économiques visant le désengagement de l’État d’un certain nombre de fonctions au profit du secteur privé par la dissolution des structures étatiques. Ce qui n’a pas été sans conséquence sur la formation agricole et rurale.

  • La deuxième phase couvrant la période de 2010 à 2014 

L’intégration de la FAR dans les priorités du gouvernement à travers la réalisation d’un état des lieux des dispositifs de formation agricole et rurale en 2012 caractérise cette phase. C’est le début de rénovation du dispositif FAR qui s’est traduit par la réalisation d’un état des lieux des dispositifs de formation agricole et rurale en 2012 et la création en 2013 de la Direction de la Formation de la Diffusion des Techniques et des Organisations Professionnelles Agricoles (DFDTOPA) dont l’une des missions est de coordonner de toutes les actions de formation agricole et rurale au Togo. Un Groupe de Travail sur la Formation Agricole et Rurale (GT-FAR) a également été mise en place en 2013 et a conduit à l’élaboration et l’adoption d’une stratégie nationale de la FAR (SNFAR).

  • La troisième phase couvrant la période de 2015 à l’horizon 2030 :

Cette phase est marquée par une vision claire de la FAR avec la mise en œuvre de la Stratégie Nationale de la FAR (SNFAR, 2015-2020), le regroupement des centres de formation agricole et rurale (CFAR) au sein de l’Association Professionnelle des Centres de Formation Agricole et Rurale (APCFAR) en 2015, l’élaboration et la mise en œuvre du projet Structuration et Amélioration de la Formation Agricole et Rurale et de l’Insertion (SAFARI, 2017-2023), la création des Instituts de Formation en Alternance pour le Développement (IFAD) de Elavagnon et de Barkoisi, etc.

Meilleure connaissance des acteurs du système de la formation continue

A partir de la synthèse documentaire et des rencontres institutionnelles, nous avons analysé le contexte et des acteurs du système de la formation continue dans la zone de Kpalimé. Ce qui nous a permis de classer les acteurs en trois catégories : les demandeurs de services de formation (agriculteurs, éleveurs, transformateurs, organisations de producteurs, jeunes, femmes, entreprises, …), les offreurs de services de formation (69 CFAR, ICAT, Inades-Formation, …) et les facilitateurs de la formation ou services d’appui à la formation (collectivités territoriales, autorités locales, institutions financières, …).

Adaptation de la formation continue aux besoins des acteurs agricoles

Les producteurs bénéficient de l’appui-accompagnement notamment des formations de l’ICAT (Institut de Conseil et d’Appui Technique), de l’UTCC (Unité Technique de Café Cacao), de l’ITRA (Institut Togolais de Recherche Agronomique) et de leur partenaire GIZ (agence de coopération allemande pour le développement). Des diagnostics participatifs sont réalisés avec les agriculteurs afin d’identifier leurs besoins en formation. Ces formations contribuent à l’amélioration des compétences techniques (bonnes pratiques agricoles durables) et entrepreneuriales (compte d’exploitation, gestion, …) des producteurs et de leurs organisations professionnelles. Cependant, certaines formations sont peu adaptées aux conditions de vie et de travail des producteurs (ex : adoption du compostage / pénibilité du travail) et les effets sont limités par les difficultés structurelles.

Concernant les femmes, on note aussi de nombreuses difficultés structurelles qui limitent les effets des formations reçues. Leurs conditions de vie et de travail des femmes (langue, niveau d’étude, surcharge de travail) ne favorisent pas l’accès à ces opportunités.

Enquête de terrain des apprenant.e.s MIFAR auprès d’une productrice de riz

Coordination du système de formation continue avec les autres services à l’agriculture

Pour que la formation continue soit efficace, il faut qu’elle soit coordonnée avec les autres services à l’agriculture. Il ressort de l’analyse des données obtenues auprès des acteurs qu’il existe des relations positives entre les ministères en charge de l’enseignement technique et de l’agriculture et une bonne collaboration entre l’APCFAR et les CFAR. De plus, on note un intérêt croissant des partenaires techniques et financiers à travers des projets et programmes. Cependant, au niveau local (communes, villages, …), il y a une faible coordination entre les structures de recherche, de formation continue et de conseil agricole d’une part, et des actions de formation.

Nos recommandations

Pour garantir l’efficacité et la durabilité du système de formation, nous recommandons que :

  • Les producteurs soient formés en agriculture durable notamment en agroécologie ;
  • Les producteurs soient formés davantage en gestion d’exploitation agricole ;
  • Le contexte culturel et social soit suffisamment pris en compte dans les formations ;
  • La prise en compte des conditions des femmes dans l’organisation des formations ;
  • Le renforcement de capacités des formateurs et conseillers en ingénierie pédagogique ;
  • La mise en place des dispositifs de suivi-évaluation post-formation ;
  • Le renforcement des capacités logistiques (infrastructures, équipements et matériels) des CFAR ;
  • L’amélioration de la coordination entre les collectivités territoriales et les acteurs de la FAR ;
  • L’implication de toutes les parties prenantes dans les conceptions et dans la mise en œuvre de programmes de la FAR pour plus d’appropriation.

Impressions et remerciements

Je suis particulièrement heureux de rejoindre le Master MIFAR, un excellent programme d’apprentissage en ingénierie de formation agricole et rurale. C’est une formation qui allie connaissances théoriques et pratiques. Au cours de ce stage réflexif, j’ai appris “comment partir d’une commande pour réaliser une étude scientifique à travers la problématisation d’une situation professionnelle“. Il m’a permis aussi de questionner mes pratiques professionnelles et d’acquérir de nouvelles compétences pour accompagner les dynamiques de changement. Ces nouvelles compétences me seront bénéfiques dans mes missions d’enseignement/formation et de recherche-action.

Il est possible d’être un acteur de changement à mon échelle d’action ou d’intervention dans ma posture. Les paysans sont des professionnels de leurs métiers et porteurs de connaissances. Par conséquent, je dois adopter une posture d’accompagnateur pour co-construire avec eux.

Par ailleurs, je me réjouis de faire la connaissance d’autres professionnels de la FAR et d’élargir mon réseau professionnel. Je me sens évidement curieux et très excité de cette nouvelle expérience d’apprentissage. Je suis donc confiant quant à la suite de la formation.

Ce qui m’a marqué durant ce stage, c’est la posture de nos professeurs et leur approche de co-construction de la connaissance. Sur ce, je remercie nos chers professeurs, le Réseau FAR et son partenaire Agence Française de Développement (AFD).

Kossi Kakpo
Pour la promotion 2023/2024 du master MIFAR.

Kossi Kakpo
Apprenant MIFAR 2ème promotion

Agroéconomiste de formation, Kossi KAKPO est directeur d’une entreprise d’agrobusiness et d’appui-conseils. Parallèlement, il intervient dans un institut privé d’enseignement supérieur en tant qu’enseignant vacataire et dans un centre de formation agricole et rurale (CFAR) en tant que formateur. Il met également son savoir-faire au service des projets et programmes de développement agricole et rural.

En vidéo : retours sur le module présentiel au Togo 2023/2024

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