Depuis le département de Podor, riche en terres, en eau et en cheptel mais fragilisé par la dégradation des ressources naturelles, la dépendance aux intrants chimiques et la faible résilience des systèmes de production, la FONGS a initié une démarche de transition agroécologique ambitieuse. L’objectif est de tester une approche formative orientée changement, mobilisant les acteurs clés du territoire, et démontrer sa pertinence dans un contexte de changement climatique, de creusement des inégalités et de dégradation des ressources naturelles et immatérielles.
Du constat à l’action
Le département de Podor dispose de ressources agricoles majeures avec 140 000 ha de terres irrigables, 64 % du cheptel régional mais il est confronté à une dégradation rapide des ressources naturelles, à une forte dépendance aux intrants chimiques et à des systèmes de production fragiles face aux chocs climatiques et économiques. Pour répondre à ces défis, la FONGS a mobilisé les acteurs autour d’un diagnostic agroécologique participatif. Ce travail collectif a permis de co-construire une vision du changement partagée, plaçant la gestion durable des ressources et l’intégration agriculture-élevage au cœur de la stratégie.
Un processus construit étape par étape
La stratégie repose sur quatre actions clés. D’abord, la mobilisation des acteurs autour des enjeux liés à la dégradation des ressources et à la précarité des exploitations familiales, afin de créer une dynamique collective. Ensuite, une vision du changement est co-construite à partir d’un diagnostic agroécologique participatif du territoire, permettant d’analyser les pratiques, de valoriser les savoirs paysans et de définir les priorités. La troisième étape consiste à préparer à l’action en renforçant la compréhension des enjeux et en proposant des formations de base sur les trois dimensions de l’agroécologie. Enfin, l’accompagnement des apprentissages se fait par un appui technique et en équipements, l’utilisation d’outils comme l’autodiagnostic agroécologique et le bilan simplifié, ainsi que par des visites de paysans à paysans, véritables moments d’échanges pour diffuser et ancrer les innovations dans les pratiques.
Des résultats qui transforment les pratiques
Ce travail a permis de former et accompagner 840 exploitations familiales, dont 40 exploitations de référence, autour de pratiques intégrant agriculture et élevage (stabulation du troupeau, cultures et arbres fourragers, fertilisation organique, diversification culturale, agroforesterie, valorisation du lait, et concertations familiales régulières). Les coûts d’alimentation du bétail ont baissé de 41 %, ceux des engrais de 29 %, tandis que la production laitière a bondi de près de 70 %. La couverture alimentaire et sanitaire est passée de 6,36 à 11,36 mois, et l’inclusion sociale s’est renforcée. Au niveau communautaire, les comités de gestion des ressources naturelles sont plus efficaces, les forêts se régénèrent et les captures de poissons ont augmenté de 55,46 %. L’agroécologie est désormais intégrée dans les plans locaux de développement (PLD) et considérée comme un levier stratégique par la FONGS.
Changer les pratiques et les mentalités
L’agroécologie est aujourd’hui intégrée comme approche transformatrice au sein de la FONGS : elle devient un levier de développement territorial et de redynamisation des organisations paysannes. La démarche TAE a permis de passer d’une approche sectorielle à une vision holistique, multi-échelle (parcelle, terroir, territoire) et multi-acteurs, reposant sur la co-construction et l’apprentissage par l’action.
Leçons et conseils
L’expérience montre que l’agroécologie est un levier de transformation globale, permettant de reconstruire simultanément les dimensions économiques, sociales et écologiques des territoires. Le changement est plus durable lorsque les acteurs locaux sont au cœur du processus, de l’analyse à la mise en œuvre. L’apprentissage par la pratique et les visites entre pairs sont particulièrement efficaces, tout comme l’ancrage territorial et institutionnel qui assure la pérennité des actions. Trois conseils ressortent : impliquer largement les acteurs dès le diagnostic, articuler accompagnement technique, social et humain, et intégrer la démarche dans les politiques locales pour en faire un véritable projet de territoire.
