[Paroles d’acteur] Enseigner à Produire Autrement, un cap structurant pour la transition agroécologique en France

Depuis 2014, la France met en œuvre le plan Enseigner à Produire Autrement (EPA), inscrit dans le Projet agroécologique pour la France. Son objectif est de conforter l’engagement de l’enseignement agricole dans les transitions et de faire de l’apprenant l’acteur central du processus. Piloté par le ministère de l’Agriculture et décliné en plans régionaux par les DRAAF, il mobilise les établissements et les exploitations agricoles comme leviers d’expérimentation et de démonstration. Deux plans EPA ont déjà été réalisés et une nouvelle impulsion politique est prévue en 2026.

Du constat à l’action

La loi d’avenir pour l’agriculture de 2014 a marqué un tournant en intégrant performance économique, environnementale et sociale. Elle a dessiné les lignes d’un nouvel équilibre entre pratiques agricoles et compétitivité, en plaçant la transition écologique au cœur du développement. Le plan EPA est né de cette dynamique pour engager les établissements et équipes pédagogiques dans la formation des jeunes et actifs aux pratiques durables. L’ambition était claire : enseigner autrement pour produire autrement, en intégrant l’agroécologie dans les référentiels, les projets pédagogiques et les démarches de territoire.

Un processus construit étape par étape

Le plan EPA a d’abord défini des plans régionaux pilotés par les DRAAF et des plans locaux dans chaque établissement. Il a favorisé l’ingénierie pédagogique avec des outils d’animation comme les jeux sérieux ou des méthodes de diagnostic de durabilité (ESR, IDEA4). Les exploitations agricoles et ateliers technologiques des établissements sont devenus supports de démonstration et d’expérimentation, par la réduction des intrants, la conversion à l’agriculture biologique ou la certification environnementale. Enfin, EPA a impulsé des dynamiques territoriales via des partenariats, des journées techniques et des projets collectifs.

Des résultats qui transforment les pratiques et les mentalités

Le plan a renforcé la visibilité des établissements et la synergie interne des équipes, avec un rôle moteur des exploitations agricoles. Il a permis un foisonnement de projets pédagogiques et une mobilisation des communautés éducatives, du tri des déchets à l’approvisionnement durable des cantines. Tous les référentiels de diplômes ont été rénovés, introduisant une pédagogie du questionnement et de la co-construction des savoirs. Les apprenants prennent davantage la parole et s’engagent sur les enjeux de transition. Toutefois, des disparités demeurent, certains enseignants restants insuffisamment outillés et un essoufflement se faisant sentir, appelant une nouvelle impulsion.

Leçons et conseils

L’expérience montre l’importance du travail collectif et de la synergie entre enseignement, recherche et développement. Le changement demande du temps, tant pour transformer les pratiques pédagogiques que pour accompagner les représentations. Il est nécessaire de proposer un cadre de référence clair avec des objectifs chiffrés et de mobiliser l’échelon régional pour garantir l’appropriation. L’implication de tous les acteurs (directions, formateurs, professionnels, enseignement supérieur) doit être recherchée. Enfin, il importe de placer les apprenants en situation d’agir, à travers des visites de terrain, des comparaisons, des analyses et des échanges entre pairs.