[Paroles d’acteur] Favoriser l’apprentissage des compétences professionnelles par la pédagogie de projet

Depuis 2018, l’EPL Terre d’Horizon, à Romans-sur-Isère, déploie un dispositif de formation en BTS qui place les apprenants au centre de leur parcours, comme acteurs et auteurs des transitions agricoles. L’objectif est de leur permettre d’acquérir les compétences professionnelles essentielles pour relever les défis agroécologiques et climatiques. S’appuyant sur un ruban pédagogique structuré autour de projets collectifs et de situations professionnelles réelles, la démarche mobilise l’exploitation agricole de l’établissement, des sites pilotes et un vaste réseau de partenaires institutionnels et techniques, dans une dynamique d’amélioration continue.

Du constat à l’action

En 2017, dans le cadre du Plan d’action global pour l’agroécologie et à la fin d’« Enseigner à Produire Autrement », l’équipe pédagogique a constaté qu’enseigner l’agroécologie ne pouvait pas se limiter à mettre à jour les contenus. Il fallait revoir les pratiques pédagogiques, voire changer de paradigme. En 2018, un tiers-temps ingénieur a permis de lancer une pédagogie par projet couvrant tout le cycle BTS, intégrant toutes les disciplines et capacités du référentiel. La Bergerie Nationale a accompagné cette évolution, en contribuant à la conception du ruban pédagogique, à l’analyse des pratiques et à la réflexion sur les savoirs en jeu.

Un processus construit étape par étape

Sur deux ans, six projets apprenants ont été conçus et menés avec les étudiants, chacun en lien direct avec les transitions agroécologiques et climatiques. Leur mise en œuvre a impliqué la recherche et la mobilisation de partenaires, la conception technique, l’écriture des séquences pédagogiques et leur expérimentation. L’ingénierie pédagogique a été élaborée collectivement, avec de nombreux temps de co-construction et d’analyse, en réunion ou en séminaire. Parmi les projets phares : « La clé des sols » sur la gestion des sols en maraîchage avec ROLVAL’TAIN et l’INRAE, « ADHEMAR » sur l’enherbement en PPAM avec l’ITEIPMAI, les chambres d’agriculture et ROBAGRI, le « GIEE MSV » sur le maraîchage sur sol vivant avec l’ADAF et des agriculteurs, ou encore « RIPAD ».

Des résultats qui transforment les pratiques et les mentalités

Depuis la mise en place du dispositif, 80 étudiants ont été formés, obtenant des résultats nettement supérieurs aux moyennes nationales. Les séquences pédagogiques ont été repensées autour des projets, intégrant six modules, vingt-et-une capacités et neuf disciplines. Les évaluations se font par capacité, sur des critères précis. Les projets et situations professionnelles ne sont plus des illustrations de cours mais le moteur qui déclenche la demande d’apports théoriques. Les étudiants montrent plus d’autonomie, de plaisir à apprendre, une meilleure capacité d’analyse et un fort investissement, en privilégiant la réflexion pour trouver des solutions plutôt que la reproduction de recettes. L’EPL a développé des sites pilotes, modifié ses itinéraires techniques vers plus de durabilité, réduit ses intrants et renforcé ses partenariats, augmentant son rayonnement sur le territoire.

Leçons et conseils

Pour libérer du temps en situation professionnelle, il faut alléger les apports théoriques et se concentrer sur les concepts et savoirs clés, afin de permettre aux apprenants de s’auto-former comme de véritables professionnels. L’organisation de l’équipe sur deux ans autour d’un ruban pédagogique commun est essentielle. L’expérience montre aussi l’intérêt de miser sur la qualité et l’aboutissement des projets, de formaliser les savoirs en jeu, de jalonner les étapes clés et de solliciter l’accompagnement d’experts en pédagogie et didactique. Prévoir des temps longs de travail collectif, comme des séminaires, est un facteur de réussite.