Au Bénin, dans le département du Plateau, commune de Kétou, le centre MAFAR a lancé en 2014 une expérience de transition agroécologique pour répondre à la pauvreté des sols, à la dépendance aux intrants chimiques et à la dépendance alimentaire vis-à-vis du Nigéria. Soutenue par la mairie de Kétou, l’Association Développement de Kétou, la Fondation MFR Monde, le Centre Songhaï, l’ATDA et l’UNMFREO, l’initiative a duré six ans avant d’être adoptée au sein du réseau béninois des Maisons Familiales Rurales. Elle vise à intégrer l’agroécologie et la pédagogie par alternance dans la formation agricole et rurale, afin de réussir l’insertion socioprofessionnelle des jeunes.
Du constat à l’action
Selon le Plan de Développement Communal de Kétou (2008), les sols présentent de faibles réserves minérales et se dégradent rapidement, rendant la production dépendante d’engrais chimiques. Les producteurs se tournent massivement vers ces intrants tandis que la commune dépend du Nigéria pour ses approvisionnements en légumes et fruits (tomate, carotte, pastèque, concombre). C’est dans ce contexte qu’a été créée une unité d’expérimentation, destinée à accompagner les jeunes ruraux comme acteurs de changement. Des démarches de plaidoyer ont permis d’obtenir un domaine sécurisé et l’appui des autorités communales pour promouvoir les produits locaux.
Un processus construit étape par étape
L’expérience a commencé par un diagnostic participatif avec producteurs et ménages ruraux, afin d’analyser l’impact de l’agriculture conventionnelle sur la santé et l’environnement. Une unité d’expérimentation a été installée au centre MAFAR avec plusieurs volets : un rucher animé par 30 jeunes formés, des espaces pour le maraîchage écologique, la compostière, l’élevage de poulets locaux et de lapins, ainsi que des plantations de moringa, papayer, oranger et citronnelle. Ces installations pédagogiques et écologiques ont été complétées par des actions de plaidoyer et de sensibilisation, mobilisant les acteurs du territoire et d’autres partenaires.
Des résultats qui transforment les pratiques et les mentalités
En six ans, 380 jeunes ont été formés et insérés, dont 140 installés poursuivant des activités agricoles. Trois modules de formation ont été co-construits (maraîchage en système intégré, élevage de petits ruminants, aviculture locale). Une boutique témoin a vu le jour, ainsi que des outils de suivi-évaluation. Dix formateurs-formatrices ont été renforcés en agroécologie, de même que dix administrateurs bénévoles sur le territoire et dix jeunes ambassadeurs. Un film documentaire est en cours de production. Ces réalisations ont transformé les ateliers d’expérimentation en unités pédagogiques à vocation économique et consolidé la visibilité du centre. Les formés ont diversifié leurs systèmes de production, accru leurs revenus, renforcé leurs relations sociales et impliqué leurs familles dans les projets. Le MAFAR de Kétou est désormais un acteur central du développement local et accompagne les réflexions stratégiques du territoire.
Leçons et conseils
Cette expérience montre que la transition agroécologique a un impact fort sur le parcours des jeunes ruraux, en responsabilisant familles et communautés. Elle exige de prendre en compte les valeurs culturelles, et de placer les jeunes et les femmes au cœur de la dynamique comme acteurs de changement. Elle révèle aussi que la transition agroécologique génère des opportunités d’emplois verts pour la jeunesse. Trois conseils ressortent : impliquer systématiquement acteurs agricoles, jeunes et femmes dans le processus ; assurer une ouverture au monde dans la transition agroécologique ; dynamiser les équipes en veillant à leur engagement moral et à leur maîtrise des outils de collecte et de suivi.
